La Faculté de Théologie de Paris au Moyen-Age - Collège de Boissy (1896)

 

             La faculté de théologie de Paris au Moyen-Age et ses docteurs les plus célèbres.  

par l'Abbé Feret, docteur en théologie
Tome 3, page 54 à 67

Paris, 1896 

 
 
 

Collège de Boissy

(1356) 

 

 Faire l'aumône de l'instruction, d'abord à sa propre famille, puis, dans l'hypothèse où la famille ne fournit plus de sujets pauvres ou vint à s'éteindre, à d'autres familles également déshéritées des biens de la terre et comprises en certaines circonscriptions, telle fut la pensée d'Etienne Vidé, chanoine de Laon, interprétant le testament de son oncle Godefroy, dont il était le principal exécuteur testamentaire. Tous deux se rattachaient par leur origine à Boissy-le-Sec au diocèse de Chartres.
Godefroy avait quitté cette vie en 1354. Dans l'acte de ses dernières volontés, il avait déclaré que les biens possédés par lui à Paris et aux environs et dont il n'avait pas disposé, seraient vendus, et qu'après l'acquittement des legs le surplus serait distribué aux pauvres de Paris et de Boissy-le-Sec, à moins que ses exécuteurs testamentaires préférassent un autre emploi charitable. L'hypothèse posée par l'un se convertit en acte par la volonté des autres : la fondation d'un collège dans le quartier Saint-André des Arts fut substitué à la répartition pécuniaire aux pauvres.
Le collège qui fut désigné sous le nom même de Boissy abrita, en premier lieu, six boursiers et un chapelain. Après la mort d'Etienne Vidé et par son commandement, il devait en abriter douze, trois pour la théologie, trois pour le droit, trois pour la philosophie, trois pour la grammaire. Un de ces boursiers, au moins, devait être prêtre, pour leur dire la messe, et un autre maître (unus magister). Les collateurs des bourses furent d'abors les exécuteurs testamentaires, et, après eux, le chancelier de Paris et le prieur du couvent des Chartreux de la même cité.
Le théologien avaient dix ans pour se préparer à lire les Sentences, le décrétiste huit et l'artien sept pour acquérir le grade de docteur ou, au moins, obtenir la licence.
Les bourses, évaluées à quatre sous parisis chaque semaine, étaient reservées aux pauvres de la famille, puis, à leur défaut, aux pauvres de Boissy-le-Sec et de ses environs, et enfin, toujours par défaut, aux pauvres de la paroisse Saint-André des Arts. "Pour constater le droit de ceux qui doivent posséder les places de ce collège, dit Crévier, et pour en exclure les étrangers, il a fallu dresser un arbre généalogique : et c'est un aspect curieux que celui de ce tableau. Dans l'espace de quatre cent ans, le nombre des parents des fondateurs s'est extrêmement multiplié par les alliances, et les uns sont demeurés dans l'état de leurs pères, les autres sont tombés au-dessous, quelques uns se sont élevés plus haut. De là résulte un mélange de toutes les conditions. Dans cet arbre généalogique, vous trouverez des laboureurs, des pauvres paysans, des artisans, des marchands, des gens de robe, des magistrats,des militaires, des seigneurs : et rien ne met plus sensiblement sous les yeux la maxime contenue dans ces deux vers que tout le monde sait :

L'un a dételé le matin,
L'autre après-dinée"

C'était près de l'église de Saint-André des Arts que s'élevait le collège. Commencé en 1356, il vit l'Université lui octroyer, en 1359, l'acte d'approbationet de confirmation, en d'autrestermes, d'agrégation.
Peu de temps après, en 1366, l'établissement vit joindre à la loi première qui le régissait, de nouveaux Status "lesquels, redolens une grande perfection, dit du Breul, me semblent plus monachaux que collégiaux". Nous serions plus dans la vérité, en disant que le nouvel acte législatif corrigeait, interprétait les Statuts précédents et en ajoutait d'autres. Voici les principales additions : 
 Le maître du collège avait le titre de proviseur ou de recteur (provisor seu magister rector);  chaque boursier devait avoir son lit et sa cellule; la cuisine et la salle à manger étaient commune à tous, et pour tous la nourriture était la même; chacun et à tour de rôle, à l'exception du recteur et du chapelain, se voyait chargé des provisions de la semaine : le coffre renfermant les titres et actes de la communauté était muni de trois serrures, et des trois clefs l'une était remise au recteur et les deux autres à ceux que désignaient le choix des boursiers; les infractions au silence donnaient lieu à la réprimande et, en cas de récidive, à une punition dont le recteur demeurait juge; il falait la permission du recteur pour manger, soit dans sa chambre, soit en ville, et aussi pour inviter des étrangers à prendre repas dans le collège.